Les piliers de la terre

Attention, pavé addictif ; à n’attaquer que si vous avez un peu de temps devant vous !

Ce roman a pour fil conducteur la construction d’une cathédrale au XIIe siècle, dans une ville du sud de l’Angleterre. Ce livre est un bon roman d’aventures dans une Angleterre instable politiquement, avec des personnages au caractère bien défini. Sur la construction des cathédrales, je recommande aussi Vincenot et Les étoiles de Compostelle, lu il y a fort longtemps.

Le cadre historique est intéressant, c’est la même période troublée que dans les aventures de Frère Cadfaël, le personnage d’Ellis Peters.
Henri Ier Beauclerc, plus jeune fils de Guillaume le Conquérant succède à son frère Guillaume II le Roux en 1100. Suite au naufrage de la Nef blanche au large de Barfleur en 1120, il se retrouve sans héritier mâle, choisit sa fille Mathilde comme héritière et lui fait jurer allégeance par ses vassaux.
Mathilde (Maud) est veuve de l’empereur Henri V, d’où son titre d’Impératrice ; elle a épousé en secondes noces Geoffroy d’Anjou Plantagenêt. A la mort d’Henri, en 1135, son neveu Etienne de Blois (Stephen) s’empresse de mettre la main sur le trésor royal et de se faire couronner, soutenu par les barons et l’Eglise. Trois ans plus tard, un certain nombre de barons, dont Robert de Gloucester -demi-frère illégitime de Mathilde-, changent de camp. En 1139, Mathilde capture Henri à la bataille de Lincoln et réussit à reprendre le pouvoir. Deux ans plus tard, c’est au tour de son allié Gloucester d’être capturé. Après avoir réalisé un échange des deux prisonniers, Etienne reprend le pouvoir et les hostilités; cette guerre durera jusqu’en 1152 : un accord entre les parties permet à Etienne de régner jusqu’à sa mort (1154) et désigne comme successeur le fils de Mathilde : Henri II Plantagenêt.

Le roman se déroule de 1125 à 1174, il a pour sujet la construction de la cathédrale mais il est centré sur le Prieur Philip, supérieur de Kingsbridge et promoteur du chantier. Moine depuis son jeune âge, Philip est nommé prieur au début du roman, aidé par l’archidiacre Waleran qui devient l’évêque local. Philip prend parti pour Stephen qui défend l’Eglise et cause la chute du comte de Shiring, remplacé par Percy Hamsleigh.
Pendant ce temps, Tom le bâtisseur, un maçon, est licencié par le fils Hamsleigh, William, rejeté par Aliena, la fille du comte de Shiring. Il cherche en vain un nouveau chantier et l’incendie de l’église de Kingsbridge lui permet de se fixer et de réaliser son rêve de construire une cathédrale.
Waleran, ambitieux, ne supporte pas que Philip réussisse brillamment à redresser le monastère et risque de lui faire de l’ombre. Il s’appuie sur William Hamsleigh, devenu comte, pour le freiner de toutes les manières mais Philip, aidé de Tom puis de son beau-fils Jack, réussit à mener à bien sa mission et à finir sa cathédrale en style gothique.

Le contexte historique est très bien utilisé, la proximité des prélats et du pouvoir permet d’intégrer aisément le fil politique à l’histoire et la deuxième partie rebondit avec la lutte entre Henri II et son ancien conseiller devenu archevêque : Thomas Beckett. Le fil romanesque est habilement mené, on a un beau « page turner », avec plusieurs histoires qui se mêlent et rebondissent, le tout donne vraiment un bon roman.

Toutefois, les personnages manquent un peu de subtilité, les camps sont un peu trop déterminés. D’un côté, les méchants : William, pervers sadique et sans pitié mais influençable ; Waleran Bigod, l’évêque manipulateur et sans scrupules ; Alfred, violent et jaloux, et de l’autre les gentils : Philip, dont la cause est plus importante que le destin personnel ; Tom, un peu rustre mais au grand cœur ; Jack, brillant et amoureux contrarié et surtout les femmes, Eillen et Aliena, fortes et volontaires.

Quelques point mineurs m’ont gêné au cours de la lecture : le traducteur a choisit de garder les noms anglais des protagonistes du conflit royal, on aurait pu utiliser les noms français de ces personnages connus ; de même, la dénomination des lieux de culte, m’a surpris : prieuré et cathédrale mais jamais abbaye et enfin, je doute que le pain médiéval contenait des haricots…

Ken Follett – Les piliers de la terre, traduit par Jean Rosenthal – Livre de Poche / Stock 1990


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