Le dernier arbre

J’ai été tellement emballé par Nos disparus que j’ai eu envie de creuser un peu du coté de cet auteur qualifié de « Faulkner du XXIe » ou de « Conrad des bayous. »  Ce livre est encore plus impressionnant et je le recommande vivement. Raconter ce roman ne peut lui rendre justice, il fourmille de tellement de thèmes que je ne peux qu’en esquisser l’intérêt.

La guerre a ravagé Byron Alridge ; à son retour du front, il refuse de reprendre sa vie d’avant et se consacre à faire respecter l’ordre. Il se retrouve constable d’une scierie paumée à Nimbus, au fin fond de la Louisiane, au plus près d’une forêt de cyprès qui lui fournit sa matière première. Ayant retrouvé par hasard la trace de son fils, le père Alridge achète la scierie et envoie son cadet, Randolph, pour gérer l’entreprise et ramener le fils prodigue. Gautreaux nous plonge dans l’univers de cette exploitation forestière, nous fait ressentir la dureté du labeur et les risques de la nature sauvage qui entoure la scierie ; il arrive à rendre sensible cet univers mécanique, nous décrit des engrenages et des pistons avec une réelle poésie et à la fin du roman, la forêt est entièrement détruite, jusqu’au « Dernier Arbre ».

L’usine, loin de tout, fonctionne en circuit fermé, maîtrise plus ou moins tout ce qui rentre et qui sort, à l’exception du saloon qui sert d’exutoire aux hommes et cause de grandes bagarres que contient Byron avec une violence qui n’est pas moindre. Le saloon dépend de Buzetti, mafieux italien originaire de Chicago, qui régie le jeu, l’alcool et les femmes ; la confrontation entre Buzetti et Byron dégénère quand un des cousins de Buzetti est tué par Randolph, une vengeance terrible se met en place qui touche les deux camps.

Cette trame de trame de roman noir est enrichie par une immersion dans cette Louisiane pauvre et reculée des années 20 mais aussi par les superbes relations tissées entre les personnages. Les couples Emma-Byron et Lilian-Randolph, les personnages secondaires, comme Merville ou May, ont tous leur importance ; leurs relations sont évoquées par petites touches avec beaucoup de finesse et cela participe de l’intérêt de ce livre. En plus d’être un excellent roman noir, Le dernier arbre est aussi un bon roman d’aventures mais c’est surtout une formidable épopée familiale portée par les thèmes de la fraternité et de la paternité.

Tim Gautreaux – Le dernier arbre, traduit par Jean-Paul Gratias – Seuil 2013

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