Titien, Tintoret, Véronèse, rivalités à Venise

Danae_Titien

Une belle exposition au Louvre qui rapproche le travail de ces 3 maîtres, et de quelques autres (notamment Bassano).

Je n’avais pas percuté que les 3 étaient contemporains (2e moitié du XVIe), Titien étant déjà reconnu quand Tintoret et Véronèse débutent.
Titien reste le maître, il semble que Tintoret ne se soit pas entendu avec lui et qu’il ait favorisé Véronèse, ce qui a dû encore ajouter à leur rivalité.

Pour moi, Titien c’était des personnages dans leur splendeur, avec des portraits assez lisses ; Tintoret se démarquant de Véronèse par des peintures plus sombres, plus torturées.
En fait, on sort de cette rétrospective assez troublé car les certitudes se sont envolées ! J’ai vu des œuvres de Tintoret lumineuses et des Titien au trait plus épais…
Ce n’est pas grave car nous avons vu des splendeurs !

Le génie de Venise est d’avoir permis à de nombreux talents de s’épanouir en même temps. Comme il n’y a pas de Cour, les commandes officielles se font par Concours, pour le palais des Doges, des églises ou des organismes puissants (cf le le livre Venise.net qui retrace le concours pour la Scuola grande di San Rocco et comment Tintoret a pipé les dés et gagné).

L’exposition illustre la compétition et l’émulation entre ces peintres grâce à des thématiques.

On commence avec 2 beaux Titien : Danaé et un portrait du pape Paul III (qui viennent de Capodimonte à Naples).

Ensuite une très belle galerie de portraits par les différentes peintres. C’est là que je suis le plus surpris car il m’est impossible de différencier les peintres.
Pour suivre, quelques toiles autour des reflets. Le reflet pouvant se faire dans un miroir ou une armure, c’est une belle façon de montrer la technique et le talent des peintres. Dans la suite de l’expo, il y a une peinture étonnante dans la série sur les nocturnes : la lumière se reflète sur une épaule de cuirasse au centre de la toile et l’autre point lumineux (Jésus au Mont des oliviers) ne compte presque pas.

Veronese_Iseppo_UffiziVeronese_Livia_BaltimoreJ’ai particulièrement aimé les portraits qui suivent. Le jeune garçon (fils de pape) peint par Titien et les 2 portraits de la famille da Porto par Véronèse. Ils se font face (comme dans le salon du palais d’où ils viennent) : le père avec son fils et la mère avec sa fille. On y décèle une tendresse dans les gestes : le jeune garçon joue avec la main du père et la fille se réfugie dans la jupe de la mère. C’est une famille riche, les tissus, soie et velours, et les fourrures sont magnifiquement rendus.

Dans la grande confrontation sur des scènes sacrées, Pélerins d’Emmaus et Cène, j’ai une préférence pour la simplicité des Pèlerins de Titien. La toile de Véronèse sur le même thème rappelle, en moins majestueux, Le repas chez Levy qui est à l’Accademia : elle reprend un décor de palais vénitien et intègre des personnages aristocratiques. Dire que le peintre a subit les foudres de l’Inquisition pour cela !

Pour finir, quelques beautés féminines et notamment une autre version de Danaé de Titien. Évidemment, cette Danaé est à comparer avec celle de Tintoret , magnifique mais qui ne suggère pas la même poésie.
L’allégorie de l’amour de Véronèse est évidemment magnifique par ses couleurs.

C’est une très belle expo qui montre une grande variété de thèmes et de peintres et nous permet de mieux saisir les influences réciproques qu’il y a pu avoir.


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