Morituri

J’ai commencé par la 2e aventure du commissaire Llob, voici la première. Ce livre est beaucoup plus qu’un polar : c’est un pamphlet politique qui dénonce la mafia politico-financière qui dirige le pays.

Nous sommes en Algérie en plein dans les années noires, où le terrorisme islamiste égorge et tue à tout va. Le commissaire Llob est un personnage assez âgé pour être revenu de tout, qui reste intègre dans un monde pourri. Représentant de l’ordre, il est une cible parfaite pour les intégristes et il lui arrive d’avoir peur. Son adjoint, des amis intellectuels meurent ; son fils s’en va de la maison car il est une cible indirecte et Llob mettra sa femme à l’abri en province.

L’ambiance de haine, de peur est palpable. Khadra a des mots très durs pour décrire la situation causée par « les boucs afghans » mais aussi pour décrire la misère d’Alger causée par les profiteurs. Il est révolté que « l’on mitraille les enfants simplement parce qu’ils vont à l’école ou que l’on décapite les filles simplement pour faire peur aux autres ».

Ce livre donne un choc mais c’est aussi un bon polar, Llob est digne des privés de Hammett. Tout commence par une enquête diligentée par un ancien membre de la nomenklatura, qui tire désormais les ficelles dans l’ombre. Llob doit retrouver sa fille et va suivre la piste qui l’emmène dans les milieux interlopes où l’on magouille tout en étant proche du pouvoir. Evidemment, un groupe islamiste est de l’affaire mais, celui-ci décimé, il découvrira que d’autres tirent les ficelles… C’est encore un moyen de dénoncer la situation, les truands qui deviennent islamistes par opportunisme et les milieux proches du pouvoir qui créent le ferment de la révolte pour mieux en profiter.

Ce livre est l’un des premiers de Yasmina Khadra (c’est drôle que la préface fasse honneur à la femme qui l’a écrit). C’est un excellent roman à lire absolument, avec un écriture à la fois populaire, poétique et drôle.

Le commissaire Llob est plein d’humour et j’adore sa réplique quand on lui dit de faire attention car les gens à qui il s’adresse ont le bras long : « je me disais bien qu’ils avaient des choses en commun avec les chimpanzés ! »

Yasmina Khadra – Morituri – Baleine 1997


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