La grande aventure de l’humanité

Ce livre me fait penser aux films documentaires qui montrent en accéléré la Terre, puis la Voie lactée et enfin l’ensemble des Galaxies lointaines, c’est toujours un moyen efficace de comprendre notre place dans l’Univers. En un peu plus de 500 pages, Toynbee arrive à retracer l’histoire de l’humanité, depuis les premiers hominidés jusqu’aux années 1970.

Jamais ennuyeux, ce récit d’un grande culture m’a permis de mieux comprendre l’enchaînement des civilisations et offre une autre perspective de l’Histoire, mêlant le récit historique traditionnel avec l’histoire de la pensée et de l’art. Cette somme insiste un peu plus sur les civilisations antiques, mais reste universelle : à chaque étape, on aborde tout autant les civilisations occidentales que celles de l’Inde, de la Chine ou d’Amérique.

Deux notions structurent le livre : oikouménè (οικουμενη) et Völkerwanderung. L’oikouméné, que certains traduiraient par « écoumène » correspond au monde connu par une civilisation, il y a donc eu une oikouméné méditerranéenne en parallèle d’une chinoise, avant d’avoir l’oikouméné globale actuelle. Quant au Völkerwanderung, il est correspond aux grandes migrations, que l’on appelle aussi de façon assez restrictive les « invasions barbares » pour décrire ce qui s’est passé en Europe. En fait ces migrations ont toujours existé, les « Peuples de la mer » qui ont envahi l’Egypte ancienne en sont un très ancien exemple.

Plusieurs choses m’ont particulièrement intéressé dans cette lecture : le développement des Cités-Etats en civilisations régionales ; l’importance de la steppe asiatique qui a toujours connu de grand mouvements de populations (Huns, Mongols…) qui sont la cause d’autres invasions ; l’évolution de l’Empire romain, sa construction, les relations entre ses deux parties et sa chute, qui a été beaucoup moins brutale que ce que je pensait.

J’ai aussi bien aimé la neutralité religieuse de ce livre. L’histoire de la Palestine et de la Syrie ne reprend pas les légendes véhiculées par la Bible et la description du processus qui a marqué la victoire du christianisme sur les autres religions est passionnante : Marie est restée une déesse, incarnation de Cybèle et d’Isis pendant que Yahvé correspond à Zeus, et Jésus à Horus ou Mithra, mais ce sont les versions chrétiennes qui ont remporté l’adhésion.

Les ouvrages de référence de ce type sont souvent des livres où l’on picore des informations ; celui-ci se lit aisément grâce à ses chapitres courts et il est porté par un style élégant au service d’une formidable érudition. J’ai aussi trouvé l’approche originale car elle intègre des éléments que l’on oserait pas comparer comme dans cet extrait :

Dans la conquête du grand large, les Chinois précédèrent les harengs de 12 années et les harengs précédèrent de 3 années le prince Henri le Navigateur. L’empereur Yong-lo envoya sa première flottille vers l’ouest en 1405 ; les harengs transférèrent leurs zones de frai de la Baltique à la mer du Nord en 1417 ; le prince Henri lança sa première expédition maritime vers le sud en 1420.

Arnold Toynbee – La grande aventure de l’humanité, traduit par Guy Bunnens, Gérard Colson et Paul Kinnet sous la direction de Jacques Potin et Hervé Douxchamps – Grande bibliothèque Payot 1994


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